Mayotte : Mr. le Ministre Darmanin il est temps de sortir de l’hypocrisie.

Certes, on connait une situation de crise singulière à Mayotte avec d’une part une immigration importante, rendue clandestine par le visa Balladur, issue des autres îles de l’archipel des Comores. Par ailleurs, cette île accueille une départementalisation construite par Sarkozy à marche forcée, autour de promesses d’égalité républicaine non-tenues vis-à-vis des populations de Mayotte. Et en toile de fond, cet archipel des Comores vit une situation structurelle de déclassement dans le prolongement de plus 1 siècle de colonisation imposé par la France.
Face aux enjeux humains de développement, d’égalité, de respect, comme trop souvent, le pouvoir engage le débat par le seul prisme de la répression. Il est temps de sortir de cette logique si on veut répondre aux enjeux de cet archipel et des hommes, femmes et enfants qui le peuple.

Il faut arrêter de croire qu’on réglera les problèmes en remettant en cause systématiquement les droits des populations. La situation de Mayotte et de l’ensemble de l’archipel des Comores, mérite d’une part que la France reconnaisse le droit international et accepte d’engager un processus de travail inscrit dans le temps à partir des recommandations de l’ONU.

L’ONU a effectivement condamné la France sur sa décision de scinder cet archipel entre l’ile de Mayotte et les 3 autres îles Ngazidja, Mohéli et Anjouan créant ainsi les conditions d’une division artificielle d’un même peuple.

Elle a complètement ignoré les populations en refusant d’investir et d’accompagner le moindre développement de cette de cet archipel. Par exemple le premier lycée sur l’île de Ngazidja, la plus grande île des Comores, a été construit en 1963.

De plus, on ne peut oublier comment les différents gouvernements français ont manipulé les clans et les dynasties locales pour maintenir sa domination jusqu’à l’utilisation d’un homme de paille comme Bob Denard.

C’est dire le mépris que le gouvernement français et la France ont affiché vis-à-vis de ce pays considéré comme quantité négligeable et uniquement regardé pour des visées stratégiques de la France au milieu de l’océan Indien. Il faut donc aujourd’hui que la France accepte de s’engager et d’accompagner réellement Mayotte, d’une part pour mettre en œuvre les engagements républicains qu’elle a promis en direction de ce nouveau département, et d’autre part pour construire une coopération sous l’égide de l’Union Africaine, s’appuyant sur une réelle aide technique et financière afin de favoriser le développement du reste de l’archipel des Comores : Ngazidja, Mohéli et Anjouan. Il est indispensable de permettre aux populations du reste de l’archipel de pouvoir avoir accès au minimum, à savoir pouvoir se nourrir, avoir un vrai droit à la santé mais aussi avoir le droit à l’éducation, l’électricité et l’eau afin de créer les conditions de leur autonomie.

Donc plutôt que de regarder quels sont les manœuvres que le gouvernement français pourraient initier avec des dirigeants comoriens, parfois complaisant, notamment sur la capacité à exploiter des réserves pétrolières où gazières qui existeraient dans les eaux territoriales comoriennes, je crois qu’il est maintenant plus que temps que la France, vis-à-vis de ce petit archipel, assume sa responsabilité historique et créée les conditions d’un « new deal » de manière à offrir des perspectives de vie dignes pour que les Comorien-ne-s puissent vivre décemment sur ce magnifique archipel plein de ressources par ailleurs.


Oui, il est temps de changer de posture, et que l’on arrête de nous effrayer en présentant la situation comme s’il y avait des centaines de milliers de migrants déferlant sur la France, en oubliant d’ailleurs que cette partie de l’Océan Indien entre Anjouan et Mayotte est d’abord un cimetière pour le peuple comorien. Cet archipel, c’est seulement un million d’habitants qui n’ont  pas seulement envie de vivre en paix mais de vivre.

Gilles Poux

Maire de la Courneuve